Pour la petite histoire, j’ai commencé à écrire ces quelques lignes en 2012 … je me suis laissé un peu de temps avant de les publier.
Le nouveau server d’hébergement du site a été piraté. Nous avons travaillé fort pour rétablir l’intégrité de magazine-audio.
J’ai donc passé en revu chacune des pages de ce blog pour faire du « ménage », ce qui m’a permis de revivre des bons moments, notamment lors des reportages sur des salons et de faire le triste constat que notre industrie peu à peu s’enlise.
J’ai noté qu’il y avait beaucoup de manufactures et de boutiques spécialisées qui ont cessé leurs activités depuis les 8 dernières années.
Revenons au sujet, vous remarquerez que…
Tout le monde se nourrit, mais peu se délectent, beaucoup de monde écoute de la musique, mais très peu en mode haute fidélité, beaucoup de gens en parlent, mais peut ont véritablement expérimenté.
La plupart des gens maîtrisent mal leur matériel hifi, pourtant certains y ont investi des sommes très importantes, autant que du temps et énergie.
Tout comme ceux qui savent apprécier les mets fins, n’en sont pas pour autant des chefs cuisiniers 🙂
Une majorité d’entre eux utilisent seulement un faible pourcentage des capacités de leur matériel et de leur connaissance.
Car dans les deux cas, c’est la mise en application du savoir qui pose problème: « je sais, mais je ne fait pas ou je ne veux pas ».
Comment éviter ce gâchis et redonner confiance à la jeune génération?
Certainement pas en leur laissant croire que le CD est mort et qu’une platine analogique ça coûte 20 000$, sans cellule et sans bras… allo, wake-up.
Le monde de la haute fidélité est à la musique ce que la gastronomie est à la nourriture, tout à la fois un chef d’œuvre ou une sorte de bouillie insipide.
L’analogie est facile partant du fait que je suis admiratif des belles et bonnes choses.
Les sons pareils aux saveurs ont besoins d’être en équilibre pour être appréciés à leur juste valeur et cela n’arrive ni en deux jours, ni par hasard, c’est le fruit d’une longue expérience.
Ce n’est ni le matériel, ni les ingredients seuls, ni l’argent qui pourra acheter le talent d’une femme ou d’un homme, capable de porter à son paroxysme aussi bien l’ouïe que le goût.
J’ai déjà joué sur un Steinway, cela n’a jamais fait de moi un pianiste, loin de là, croyez moi.
Distinguons deux catégories de personnes, les professionnels et les amateurs.
Dans les deux cas, hifi ou cuisine, on retrouve ces deux types d’individus, avec quelques nuances, ceux qui ont du talent et ceux qui n’en ont pas, les authentiques passionnés et les autres.
Le tout formant un joyeux conglomérat hétéroclite. Certaines de ces personnes parfois se croisent en joutes verbales sur les forums de discussion, avec les conséquences désastreuses que cela entraine systématiquement.
Il est impossible de traiter d’un sujet aussi délicat sans soulever des flots de protestations.
Tout le monde cuisine et pourtant seuls quelques uns sont des pros de la restauration.
Tout le monde écoute de la musique, pourtant seuls quelques uns sont des pros de la musique.
Tous les grands chefs ont suivi une solide formation sur le terrain et pour certain l’école aura été un passage obligé, pourtant, d’un restaurant à l’autre la qualité des plats servis est pour le moins aléatoire, tout comme le prix.
On peut constater que certains chefs parviennent à faire des miracles avec des ingredients simples et peu onéreux, alors que d’autres n’arrivent même pas à sortir quelque chose de « potable » avec des ingrédients haut de gamme, souvent hors de prix.
Combien de fois ai je vu des ingrédients de qualité, tel que la truffe, le foie gras, St Jacques, … être si maltraités que l’on pouvait à peine distinguer ce qu’il y avait dans notre assiette.
Ou encore prendre rendez vous dans une boutique pour écouter une paire d’enceintes acoustique de 55 000$ qui jouaient si mal que ça en était insultant.
Alors que se passe t il?
En hifi, vous pensez que les systèmes les plus chers sont forcément les plus musicaux? aie, vous êtes dans l’erreur.
Combien de fois avons nous fait le constat d’un système hifi modeste qui très bien mis en œuvre sonnait bien mieux qu’un système constitué de matériel haut de gamme mal installé.
Je reçois tous les jours des questions de la part de personnes qui possèdent du matériel haut de gamme mis en œuvre dans une acoustique de merde (pardonnez moi l’expression), sans prise électrique dédiée, et qui souhaitent quand même améliorer le rendu sonore de leur chaine sans le moindre effort.
Ça se termine souvent par les mêmes absurdes questionnements:
« … et si je changeais d’électronique … mes haut-parleurs sont peut être à remplacer … ou tient si j’achetais des câbles hors de prix … j’ai lu que ce matériel avait la quote…c’est le meilleur ampli au monde… » les gens font, lisent et entendent n’importe quoi.
Alors de là l’idée de faire le parallèle entre notre passion de la hifi avec celle de la cuisine, pour mieux faire comprendre aux béotiens qu’il ne sert pas juste d’aligner des sommes d’argent pour obtenir la performance.
Les « on dit » se font et se défont au gré du tempérament des uns et des autres, il est plus vite fait de perdre sa réputation que de la gagner.
Comme le disait si justement un humoriste français des années 80″: « les gens ont des idées sur tout, … surtout des idées. »
Pour qui sait composer de bons petits plats, savamment élaborés il est souvent question de musique, c’est plus une question d’art de vivre, de philosophie, plus qu’un simple hobby.
Les gens qui soignent leur environnement domestique et qui s’intéressent de près à l’art de la table sont rares, mais ils existent, j’en côtoient régulièrement. Ces gens là ne font pas de bruit, discrets, ils œuvrent en silence pour le bien être de leur famille et se foutent éperdument des turpitudes engendrées sur les forums de discussion où les guerres d’Ego sont légion.
Nous rencontrons trop souvent des amateurs qui découvrent du jour au lendemain une soit disant bonne recette, généralement les vertus d’une installation dans les règles et dans le moment sur le coup de l’émotion, pensent qu’ils sont devenus des cadors, assez pour dévaloriser le professionnel de la boutique d’en face qui n’y a pas pensé avant lui.
Ah, Ego quand tu nous tiens 🙂
Le gars découvre subitement que son système hifi est musical en faisant tel ou tel ajustement et voilà que cette personne se retrouve sur les forums de discussion se présentant comme étant le pro de l’installation qui vient de réinventer la roue.
J’en ai vu se transformer en moins de deux ans, partir de rien ou presque et parce qu’ils avaient un peu d’argent, vouloir devenir des « références » et se faire appeler des pros.
Internet est un terrain fertile où l’information de toute sorte et de toute nature circule.
Sachez que cette information n’est pas toujours exempte de petit soucis d’ordre éthique.
La censure, la manipulation et la diffamation vont bon train sur le net, ce qui complique encore d’avantage le travail de recherche pour celle et celui en quête de vérité.
J’irais jusqu’à dire que la vérité est ailleurs et doit bien certainement se trouver tout juste dans votre assiette ou assis dans votre fauteuil, chez vous.
Tout comme en cuisine où le restaurateur doit produire le même plat génial tous les jours, 5 à 6 jours par semaine et ceci 300 jours à l’année, la prouesse ne tient pas du fait de savoir faire et recommencer, mais bien plus d’être régulier dans l’effort, c’est la régularité qui conduit à l’excellence.
Pas seulement un coup chanceux et puis s’en vont.
Un professionnel de l’audio doit lui aussi réaliser de très bonnes associations de matériels hifi et ceci tous les jours. Il doit composer avec des clients de mieux en mieux informés, ce qui constitue également un tour de force, si on tient compte du peu de temps à consacrer à l’optimisation.
Ceci dit, il a l’avantage de travailler un produit moins périssable.
Être au top en permanence, je ne connais personne qui l’est.
Même les boutiques les plus prestigieuses ont déjà connu ou vont connaître un jour ou l’autre des revers; tout comme les meilleurs restaurants étoilés.
Si c’était si simple, ça se saurait depuis longtemps et toutes les démonstrations de reproduction en haute fidélité seraient comme le plat du jour, mitonnées avec soin et excellents en tout temps, toutes circonstances.
Mais comme le monde est ce qu’il est, imparfait, complexe et soumis aux aléas du caractère des hommes, aux caprices de la fée énergie électrique, tout comme l’instabilité des circuits électroniques, et bien c’est encore chez soi que l’on est pas mal certain de s’y retrouver, en faisant avec certaines limitations.
Je vais vous donner mon point de vue global sur la question en faisant référence à cette expérience.
Il y a quelques années j’ai fait la connaissance d’un revendeur de matériel hifi qui était aussi un passionné de la première heure, quelqu’un pour qui le coût du matériel n’était pas forcément synonyme de haute performance, mais il reconnaissait que ça pouvait aider.
De part sa grande expérience, il avait appris que tout comme la cuisine, ce ne sont pas seuls les ingrédients qui comptent mais bien plus la façon dont ces derniers seront apprêtés, la pièce étant le point capital.
Il m’avait fait une démonstration avec des enceintes acoustiques Lintra Silhouette S2 relativement modestes sur le plan du prix, mais cette démo m’avait bouleversé.
Pourtant, deux semaines plus tard, je suis repassé le visiter, mais la magie avait disparût.
Qu’avait-il fait?
Il avait changé l’architecture du système, comme c’est souvent le cas chez les personnes qui expérimentent beaucoup, mais avait oublié de noter les dits changements… oops, ce qui l’avait conduit à se perdre lui même.
Une chance que je sois passé peu de temps avant, sans quoi je n’aurais probablement pas conservé un si bon souvenir de lui.
Je retiens plus de mauvaises expériences que de bonnes dans le domaine de la hifi, où certes, il m’est arrivé très souvent de voir des systèmes de rêve, mais si mal mis en œuvre, qu’ils ne donnaient qu’une infime partie de leur potentiel et de revoir le sourire satisfait de leur propriétaire en cet instant, me déprime rien que d’y penser.
Tout comme les restaurants qui se sont avérés très moyens alors qu’ils affichaient une carte de rêve.
Il m’est déjà arrivé de quitter la table avant la fin du repas tellement c’était minable.
J’ai vu de mes yeux vus, un client se régaler d’une terrine de lièvre alors qu’il avait commandé du sanglier… un autre qui se délectait du lapin qu’il avait trouvé dans sa paella alors qu’il n’y avait que du poulet… comme le dit l’humoriste Bigard: « le client aussi est con parfois ».
Dans le temps où j’évoluais dans le métier de la restauration gastronomique, nous avions pour habitude d’évaluer les compétences d’un pâtissier en lui demandant de réaliser une « simple » tarte aux pommes et une autre aux fraises. Eux pensaient qu’ils auraient à concevoir quelque chose de plus compliqué, comme un Opéra ou un nougat glacé.
Vous seriez étonné de savoir combien de professionnels nous sont passés entre les mains avant de trouver la personne qui réussisse cet exercice.
Avec mon épouse, nous avons déjà fait quelques tournées des revendeurs hifi, pour nous rendre à l’évidence, du beau matériel, il y en a, mais du beau matériel qui reproduit fidèlement de la musique, il n’y en a pas tant que ça.
La notion d’acoustique, le placement des enceintes, le soin apporté à l’arrivée électrique, le couplage des appareils, … et bien, ce sont des notions si totalement floues, pour ne pas dire totalement exclues du vocabulaire de certains, que ça en est pathétique.
La phrase la plus entendue est: « … oui, je sais, ça ne joue pas très bien chez nous, mais on explique au client que ça sera bien meilleur chez lui dans son salon … »
Il faut donc avoir une sérieuse imagination avant de pouvoir débourser plusieurs milliers de $ dans ce genre d’endroit. Tant qu’à moi, je vous inciterais à le fuir comme la peste, ce sont des positions d’un autre âge, nous sommes en 2019, si ce genre de chose fonctionnait bien il y a 30 ans, aujourd’hui, c’est terminé.
À croire que le consommateur n’est pas aussi connaissant qu’il y a quelques années … erreur mon cher Watson, Internet a libéré de ses chaines, le péquin moyen et la frontière qui existait alors entre un professionnel et un amateur éclairé est si mince, si ténue aujourd’hui, qu’un rien peut les faire chavirer d’un bord comme de l’autre.
Il fut un temps où les revues de la presse écrite détenaient alors l’absolue vérité, celle qui ne fait jamais mal, celle qui calme les esprits, qui apaise le porte monnaie des gogos et rempli celui de ceux qui écrivent sous le regard bienveillant de leurs commanditaires.
J’ai lu il n’y a pas si longtemps, un publi-reportage, car on ne peut pas appeler ça un travail rédactionnel de journaliste objectif, d’un type qui encensait une électronique hors de prix, que nous avions entendu à plusieurs reprises et qui ne nous avait pas convaincue du tout, en affirmant que c’était certainement le meilleur produit qu’il ait entendu de tout sa courte vie… nom de Zeus, mais je rêve, si vous aviez vu le contexte d’écoute inadapté, vous n’en croiriez pas vos yeux.
À la clé, l’obtention d’un beau contrat publicitaire dans la foulée pour le magazine papier en question… comme quoi, tout est bon dans le mouton, sauf l’opinion.
Tout comme ce chef de province qui avec deux étoiles au Michelin fait manger ses convives sur des tables de bistro sans nappe. Le snobisme n’a pas de prix et aucun pli où se glisser.
Qui n’a jamais été déçu par une recommandation d’un ami ou d’un tier?
Ceci me conforte dans l’idée que nous vivons tous sous le même ciel, mais n’avons pas le même horizon.
Les goûts et les couleurs sont comme le caractère des humains, changeant et versatile.
Comment éviter ce gâchis?
C’est la question que j’ai posé au tout début.
Cela tient en quelques mots: intégrité, professionnalisme, rigueur, être à l’écoute, humilité et passion, mais surtout, faire les choses à l’endroit.
En 2019 l’information est quasi instantanée d’un bout à l’autre de la planète, ce qui vient déjouer les plans de quelques stakhanovistes bedonnants à l’appétit sans borne.
Vous savez, ceux qui se cachent en arrière d’un autre et qui voudraient quand même nous faire croire que leur lessive lave plus blanc que blanc, que vous devriez acheter le dernier appareil à la mode, tout en sachant pertinemment que c’est toujours l’argent qui mène et que l’information est biaisée à l’os.
Tout comme la cuisine gastronomique, la hifi a connu des jours meilleurs.
Notre petit cercle tend à s’amenuiser peu à peu, je serais bien curieux de savoir où en est la marché potentiel qui nous occupe.
Malgré ce déluge d’info, il reste que c’est toujours la même chanson, il faut se farcir les délires abscons des bouffeurs de fast food, les mêmes probablement qui se permettent de donner des conseils et plus grave encore, des leçons à qui veulent bien les écouter, alors qu’ils ne sont pas foutus de s’acheter des disques sur une plage régulière et encore moins d’élaborer un système hifi digne de ce nom, le mieux c’est de faire travailler les autres, c’est bien plus payant.
Mais chut, les affaires vont bon train, ne réveillez pas les opportunistes qui dorment, ça fait désordre.
Tout ça pour dire que même si nous sommes de mieux en mieux informés, il reste que rien n’est vraiment d’une stabilité sans faille, que tout comme en cuisine, l’équilibre des saveurs, comme des sons, n’est pas un exercice facile, mais si les amateurs restaient à leur place en étant moins timorés et plus attentifs; les pros plus habiles dans les faits qu’ils ne le sont avec les mots, le monde s’en porterait mieux.
J’ai trop souvent le sentiment de voir briller au travers un diamant l’éclat du zirconium.
Le high end devrait nous montrer la voie, mais est-on certain du chemin emprunté?
Nous rencontrons de plus en plus de professionnels revendeurs qui font des efforts pour soigner l’acoustique de leur salon d’écoute, et ceux là doivent être reconnus.
Rien qu’à Montréal: Audio d’Occasion sur Ontario, Brosseau sur la rive sud de Montréal.
Certains plus que d’autres ont en plus un service à la clientèle hors norme, je pense à la façon de recevoir le client sur place ou au téléphone, d’une courtoisie extrême, tel que je l’ai vu à maintes reprises de la part de Stéphane chez Audio d’Occasion.
Ceci explique pourquoi cette boutique ne désemplit pas.
Ce que j’attends maintenant, c’est de rencontrer des gens passionnants au talent fertile, qui pour les uns savent mélanger les saveurs et pour d’autres magnifier les sons.
Revenir aux belles années, 2006, 2007 et 2008 … avouez, les salons avaient de l’allure à cette époque. Chaque salon était une promesse de fête de la musique sous toutes ses formes et de nouvelles découvertes, nous redevenions pour 3 jours, des enfants laissés libres dans le magasin de jouets. J’ai encore envie d’y croire …
Pourquoi ne pas envisager de réaliser dans un proche avenir, une tournée des boutiques spécialisées, comme nous le ferions pour des restaurants, cela nous permettra de dresser une liste des endroits à recommander et ceux à éviter.
Pour l’heure, je retourne à mes chaudrons en écoutant un de mes derniers disques préférés ou visionner un spectacle de musique, pourquoi pas, là où il y a de la gène il n’y a pas de plaisir.
Alors, amusez vous, prenez le temps nécessaire pour apprécier au moins ce que vous possédez et laissez les empêcheurs de rêver en rond à leurs affaires.
La pensée du moment.
Ce que nos grands parents nous ont dit est la pure vérité. Tu recevras toujours ce que tu souhaites aux autres.
Être heureux n’est pas une affaire de destin, c’est une affaire d’options ou de choix.
Cet article a été rédigé par Marc PHILIP, rédacteur indépendant, tous droits réservés, copyright 2019, les textes et photos sont la propriété de l’auteur et du magazine. Bon divertissement.
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