Nous sommes vendredi et pour changer du monde du cinéma, je vais vous suggérer d’écouter de la musique depuis votre ordinateur, de jouer avec les réglages, de bidouiller, bref, d’avoir du fun à expérimenter une nouvelle avenue de la reproduction musicale. L’aventure avec le Calyx nous a bien plu et en ce qui me concerne, m’a stimulé au point de me lancer pour vrai, dans la conception d’un système dédié à la musique dématérialisée.
Je me suis régalé, vous le seriez tout autant dans les mêmes circonstances, mais qui dit musique dématérialisée, dit player.
Nous utilisons depuis plus d’un an Audirvana, une application gratuite qui permet de lire des fichiers de musique depuis un ordinateur Mac, c’est aussi ce que l’on appelle communément un player, dont l’interface est très agréable à regarder et à utiliser, pour ces deux raisons, il vaut la peine de s’y intéresser, au delà du fait qu’il sache également lire très correctement les fichiers de musique contenus dans un ordinateur.
Il se trouve que l’éditeur de ce logiciel Damien Plisson vient de mettre sur le marché une version payante (49$) nommée « Plus » qui apporte quelques sensibles améliorations, dont la compatibilité avec la plupart des formats audio disponibles sur le marché, y compris le DSD et un fonctionnement sous 64bits, entre autre chose, les amateurs apprécieront.
Le prix est bon, nous avons donc goûté au produit pour savoir si le fruit était mûr.
Damien a accepté de répondre à quelques questions sur son produit, je vous laisse donc découvrir avec lui, ce qui fait la singularité de ce « player » dont l’ergonomie ne laissera personne indifférent.
Bonjour Damien,
Combien de personnes travaillent sur le projet Audirvana?
Je suis seul, par ailleurs j’ai un travail de cadre sup chez un éditeur de logiciel français en parallèle.
Quelle formation avez vous?
Je suis diplômé de l’Ecole Centrale de Paris (top3 des grandes écoles d’ingénieur en France), et un MS en Computer Science à UCLA. J’ai commencé ma carrière professionnelle comme architecte et chef de projet logiciel sur le développement du logiciel de contrôle temps réel d’un système d’imagerie médicale. Puis j’ai été consultant en stratégie d’entreprise, avant de travailler maintenant dans le marketing stratégique pour un grand éditeur de logiciels. La musique a toujours été ma passion, j’ai joué du piano classique pendant plus de dix ans. (Je n’ai malheureusement plus assez de temps à y consacrer). Par ailleurs, j’ai acheté mon premier vrai système audio avec mon tout premier salaire d’ingénieur!
D’où vient le nom Audirvana?
Audirvana vient de la compression des mots Audio + Nirvana
Quels sont les points forts de Audirvana?
Qualité sonore (lecture, sur-échantillonage, dithering, …), facilité d’utilisation (plug’n’play, intégration à iTunes), variété des formats de fichiers supportés (y compris DSD)
Quels sont les points faibles de Audirvana?
iTunes est le principal point faible de part son système de catalogage trop orienté pop music.
Si vous deviez améliorer le soft à son point culminant, qu’est ce que vous feriez?
C’est un des points forts: je continue le développement en rajoutant notamment des fonctionnalités. Et ce ne sont pas les idées qui me manquent…
Les principales directions sont:
- Encore une amélioration de la qualité sonore,
- Un support total (et pas seulement du format DSD) du DSD et associés, notamment en faisant partie du comité de standardisation DSD over PCM,
- À plus long terme: le remplacement d’iTunes pour une gestion digne de ce nom d’une bibliothèque étendue de disques, notamment en musique classique (gérer chef d’orchestre, solistes, orchestres, …).
Quelles sont les spécificités de la version « plus » par rapport à la version de base gratuite?
Une qualité audio encore améliorée (décodage entièrement en 64bit, et moteur de lecture optimisé), des formats supplémentaires lus (APE, WavPack, Cue Sheet, DSD (.dff et .dsf, en natif ou converti en PCM)), le filtrage de la liste de lecture par un champ de recherche, l’utilisation des algorithmes d’iZotope pour la conversion de fréquence d’échantillonnage et le contrôle du volume par « dithering », et l’intégration optionnelle avec iTunes.
Comment fonctionne Audirvana en fait, qu’est ce qui fait sa singularité?
1. Accéder au plus bas niveau possible de CoreAudio pour supprimer toutes les opérations intermédiaires nuisibles à la qualité audio.
2. Optimiser en plus le chemin audio au niveau du pilote (« mode Entier ») en transmettant les données déjà au format du DAC.
Ce mode a malheureusement été supprimé par Apple dans OSX Lion.
3. Lecture du fichier, décodage, conversion de fréquence d’échantillonnage (si nécessaire), mise au format du DAC et stockage en mémoire tampon entièrement réalisés AVANT la lecture (ou du moins pendant les premières secondes pour ne pas nuire à la réactivité): « Full Memory Play ».
Ce point 3 permet de réduire à quasi-néant la différence audible entre un fichier FLAC et un fichier WAV. A comparer avec les lecteurs réseau type NAIM notamment.
4. Les fonctions évidentes qui manquent à iTunes, comme la commutation automatique de la fréquence d’échantillonnage, l’accès exclusif au périphérique.
5. SysOptimizer qui permet de désactiver temporairement (pendant la lecture) les services non essentiels d’OS X qui nuisent à la qualité audio, comme Time Machine, Spotlight, et le polling régulier du bus USB pour découvrir les iPod, iPhones,… à synchroniser avec iTunes.
Comment Audirvana se positionne face à Amarra?
Tout d’abord Audirvana est offert à un prix moins exorbitant.
Mon pari est de rendre accessible la haute qualité audio pour atteindre non seulement le public des audiophiles les plus mordus, mais aussi tous ceux qui sont sensibles à la qualité audio et qui ont un Mac, et un DAC.
Sinon, aucun compromis sur la qualité, celle d’Audirvana+ étant souvent trouvée meilleure que celle d’Amarra.
Je vous laisse juge sur la facilité d’utilisation et la stabilité 🙂
Quel est le rapport entre iTunes et Audirvana?
Audirvana Plus offre une option de mode intégré à iTunes permettant de le piloter entièrement depuis iTunes (et son app Remote associée sur iPhone/iPad).
Actuellement en version beta la version 1.2 offrira la possibilité de cataloguer dans iTunes tous les fichiers lisibles par A+.
Peut on lire des fichiers HD en 24/192 sans perte?
Absolument, et même les 32/384 d’ailleurs (format DXD), ainsi que les fichiers DSD64 et DSD128 avec les DACs compatibles.
Qu’en est il des fichiers DSD?
Les deux types de fichiers DSD (DSDIFF (.dff) et DSF (.dsf)) sont reconnus avec l’ensemble de leurs métadonnées et ceux pour les deux fréquences d’échantillonnage (2.8 et 5.6MHz).
Je suis en train de regarder la possibilité de lire directement les fichiers compressés (DST) et les images ISO de SACDs.
Si le DAC connecté le permet, le signal DSD natif est directement envoyé au DAC (actuellement Playback Designs, Mytek, dCS et exD)
Sinon, il est converti en PCM avant envoi au DAC.
Que pensez vous du dithering?
Le dithering diminue légèrement la qualité de lecture de par son traitement en temps réel, mais utilisant l’algo MBIT+ d’iZotope, la référence en la matière, j’ai eu plusieurs retours d’utilisateurs qui ont été tellement convaincus qu’ils en ont supprimé leur préampli, trouvant la qualité meilleure en dithering qu’avec le contrôle analogique du volume de leur préampli.
Comment utiliser optimalement son logiciel? avez vous des astuces qui ne figurent pas forcément dans la notice?
J’ai essayé de faire figurer l’ensemble des réglages dans la notice.
De plus, la configuration standard est quasiment l’optimale: j’ai essayé de mettre en oeuvre le plus possible l’auto-détection du matériel connecté (« plug’n’play »).
Le seul réglage à faire manuellement est de mettre en route SysOptimizer.
Je ne l’ai pas mis en standard sur ON pour éviter de perturber des utilisateurs qui ne comprendraient pas pourquoi Spotlight ou TimeMachine ne fonctionnent plus pendant la lecture de musique.
Ah si, un point, pour ceux utilisent le sur-échantillonnage, la valeur optimale du filtre de « pre-ringing » pour iZotope se situe entre 0.7 et 0.8.
Avez vous un guide de l’utilisateur en français?
Je n’ai malheureusement pas le temps de mener de front deux versions du manuel utilisateur, préférant me consacrer au développement proprement-dit du logiciel.
En revanche, dès que je devine qu’un utilisateur francophone me pose une question, je suis heureux de lui répondre en Français.
Audirvana n’est pas qu’un simple player, comment peut on le qualifier?
« Le Son de vos Rêves » 🙂
Je le qualifierai de transport audiophile.
Quels sont les fichiers de musique qui passent le mieux avec la version « plus »?
Tout d’abord ceux qui sont bien enregistrés!
Ensuite, un enregistrement DSD de bonne qualité sur un DAC DSD (j’ai un proto d’exD) permet de passer un très bon moment…
Quels sont les fichiers de musique qui passent le mieux avec la version gratuite?
Comme sur la version Plus pour les fichiers PCM, il y a un (très) léger avantage au WAV, suffisamment faible pour que ma bibliothèque soit au format Apple lossless.
Pouvez vous encore faire évoluer la version « plus » ou est elle aboutie?
J’ai encore des idées en réserve, notamment au niveau de la qualité audio, ces mises à jours seront gratuites comme les précédentes, ce qui est d’ailleurs bien apprécié de mes utilisateurs.
Que pouvez vous dire à nos lecteurs pour les inciter à utiliser votre logiciel?
Pour le prix de quelques CDs, ils peuvent transformer leur Mac dont ils apprécient la facilité d’utilisation pour accéder à toute leur musique, et devenir leur meilleur transport audiophile.
Comment en êtes vous arrivés à l’interface actuelle de Audirvana?
J’ai commencé fin 2010 par vouloir comprendre comment un logiciel pouvait améliorer la qualité audio, en expérimentant par moi-même quelques idées.
Encouragé par des utilisateurs/expérimentateurs et de fabricants de DAC audiophiles (notamment AMR, Playback Designs, exD, …), cela a donné Audirvana (Free).
Puis, au vu du succès, j’ai continué.
Et … pour pouvoir aller plus loin (par ex. acheter une license à iZotope), et proposer encore plus, j’ai lancé la version plus.
Protocole de test
Utilisation de la version d’évaluation Audirvana Plus
- DAC Calyx,
- Mac Book Pro 2.2 Dual Core 2 Duo de 2007,
- Disque dur de 500Go à 7500 tr/mn,
- Fichiers : AIFF, Wave, DSD,
- Résolution : 44.1, 176K et 192K (Fidelio, 2L),
- Sans iTunes,
- SysOptimizer enclenché et 2 Go de mémoire allouée,
- Système d’exploitation : Mac OS Snow Leopard 10.6.8,
- Câbles USB : le modèle standard à 5$, un Audioquest Coffee à 250$ et un Siltech Classic Anniversary à 1000$,
- Alimentation électrique dédiée pour le laptop et le DAC,
- Enceintes acoustiques actives Elan Monitor, modèle JazzMaster 10CX.
Contact et information
Directeur : Damien PLisson
La pensée du moment
« L’ennui c’est le sang qui coule de la blessure du temps », note de Sylvain Tesson un soir de spleen alors qu’il vivait seul sur les bords du lac Baïkal, une retraite volontaire de 6 mois en condition extrême.
Cet article a été rédigé par Marc PHILIP, rédacteur indépendant, tous droits réservés, copyright 2012, les textes et photos sont la propriété de l’auteur et du magazine.
Bon divertissement.
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