Academy by Lowther

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Lowther full range speaker

Préambule

Faisons connaissance, si vous le voulez bien.
La plupart d’entre nous avons, sans égard à nos origines sociales ou démographiques, une appréciation marquée pour la musique (peu importe le genre).
Pour certains, cette appréciation se transforme en passion et occupe une part importante de nos loisirs et de nos intérêts.

Quand cette passion passe par la reproduction musicale, à travers une chaîne audio agencée selon nos goûts et nos moyens, il arrive souvent qu’elle se transforme en quête (parfois sans fin) de l’absolu, qui devient le but ultime de l’audiophile.

Comment parvient-on à reproduire dans un environnement domestique, en passant de surcroît par un médium d’enregistrement et de stockage, l’émotion musicale qui nous entraîne si souvent dans les salles de spectacle ou autres haut lieux de la musique?
Il y a autant de réponses à cette question, semble-t-il, qu’il y a de produits disponibles sur le marché de la haute-fidélité.

J’en sais quelque chose… et si vous lisez ceci, je présume que vous aussi.

C’est un peu pourquoi je préfère afficher dès maintenant mes couleurs, plutôt que de devoir expliquer plus tard l’origine de mes préférences.:-)

Ma propre chaîne audio est en constante évolution depuis des décennies.
Ma quête a ceci de particulier, qu’elle est basée sur la recherche de la simplicité et de la vérité; l’essence de la musique.

Depuis un certain temps, ma chaîne se compose de plus en plus de composantes désarmantes de simplicité, faisant appel à des technologies parfois anciennes (les disques vinyles, les amplifications à tubes, les haut-parleurs large bande, etc.).

Ces composantes, considérées par plusieurs comme de purs anachronismes (surtout à l’ère digitale), ont pour moi cette habileté à libérer la reproduction de tout artifice (plaisants soient-ils), qui nous éloigne de l’essence du message musical.
On pourrait en débattre longtemps, mais mon expérience personnelle me dit que c’est une voie fidèle vers l’authenticité de la musique reproduite.

J’ai ainsi développé un penchant marqué pour les amplificateurs à Triodes de faible puissance et les haut-parleurs de très haute efficacité.

J’y ai investi considérablement de temps et d’effort, mais les résultats ont toujours pour moi été très révélateurs. Comme je le dis souvent, les amateurs de « tubes » et de haute efficacité, forment un très petit cercle, à l’intérieur du cercle déjà restreint des audiophiles.
La combinaison d’amplificateurs à tube et de haut parleurs large bande représente une façon très convaincante de reproduire la musique dans son « essence », mais ce n’est certainement pas la seule.

LOWTHER? VOUS AVEZ BIEN DIT LOWTHER?

Lors du dernier Festival Son et Image (FSI) de Montréal (édition 2007), j’ai eu le plaisir d’entendre plusieurs chaînes faisant justement appel au support vinyle, aux amplificateurs à tubes (single-ended) et aux haut-parleurs à haut rendement.

Ce retour aux sources est pour moi une évolution bienvenue du monde de la haute fidélité. C’est une reconnaissance, après des années à se faire offrir des appareils hauts de gamme, complexes, parfois pompeux et souvent sans lien avec la vérité sonore, que « less is more ».
C’est dans ce contexte que l’on m’a proposé de faire un banc d’essai d’un des plus vénérables haut-parleurs large bande encore en production aujourd’hui : le Lowther, modèle Academy.

 

gros plan sur le cône central d'un HP Lowther

Barnaby Ng, le représentant de Quinceton Audio de Toronto, à qui revient la tâche parfois difficile de faire connaître ces légendaires haut-parleurs, avait apporté pour l’occasion une paire d’enceintes à pavillon replié, modèle Academy, chacune munie de deux transducteurs Lowthers EX-3.

 

Lowther modèle Academy.

C’est donc, je dois l’avouer, avec une certaine trépidation que j’accepte d’apporter ces haut-parleurs chez-moi pour une écoute prolongée, question de bien cerner les caractéristiques de ces légendes britanniques.

 

Lowther modèle Academy au FSI 2007

Quand j’ai reçu les haut-parleurs Academy, j’ai du passer un coup de fil à Sylvain, un ami audiophile qui vit lui-même avec des Lowthers depuis un certain temps.

Il m’a aidé à sortir les bêtes de leur boite et à les installer dans ma pièce d’écoute.
Il faut dire d’emblé que ces haut-parleurs ne sont pas si imposants, considérant qu’il s’agit de haut-parleurs à pavillon arrière, munis de 2 transducteurs de surcroît.
Les boîtiers mesurent 28 cm de large, 44 cm de profond, 1 mètre de haut et pèsent environ 60 kg. Le modèle Academy est basé sur un plan offert depuis plusieurs années par Lowther.

Ce plan est disponible sur différents sites Internet dédiés aux transducteurs de la marque et à leurs différentes utilisations. Notez que l’on retrouve de par le monde, depuis des décennies, plusieurs clubs d’amateurs qui consacrent leurs activités à l’utilisation et à l’appréciation des transducteurs Lowther.

Les Academy, produites par Sound Mechanics et distribuées au Canada par Quinceton Corporation, semblent très bien construites.

Leur finition est de qualité et esthétiquement très réussie avec leur placage d’érable pâle. Le caisson est fabriqué d’une combinaison de MDF, de contreplaqué de qualité et de bois massif.

 

Lowther modèle Academy dans leur contexte

Ces différents matériaux ont été choisis pour leurs qualités acoustiques en fonction de leur emplacement dans la construction. Le câblage interne est de cuivre solide (de fort calibre) et aucun amortissement n’est utilisé à l’intérieur des caissons. Les transducteurs sont connectés directement aux borniers (on en trouve deux paires, alimentant les transducteurs séparément) de bonne facture placés sur la face arrière des enceintes.

Les enceintes Academy sont donc chacune munie de deux transducteurs Lowther large bande de dernière génération, modèle EX-3. Les EX-3 se situent à peu près au milieu de la gamme Lowther qui comporte 3 séries (aimants céramiques pour la série C, aimants alnicos pour la série A et aimants néodyniums pour la série DX et EX). Le moteur des EX-3 est donc fabriqué à partir de néodynium qui procure un champ magnétique de 1.9 teslas, couplé avec une bobine mobile de 3.9 cm (qui est enroulée sur les deux faces) et une surface émissive de 17,8 centimètres de diamètre.

Ce large bande comporte deux cônes concentriques (basses et hautes fréquences), ce qui supprime les problèmes de mise en phase courant avec les haut-parleurs multi-voix car les centres d’émission sont beaucoup mieux alignés. L’efficacité du EX-3 est de 97 dB dans une charge de 8 ohms. Lorsque les deux transducteurs sont branchés en parallèle dans un système à pavillon, on obtient une efficacité supérieure aux 100dB pour une charge de 4 ohms.

MAINTENANT QUE LES PRÉSENTATIONS SONT FAITES…

Une fois les « bêtes » installées dans ma pièce d’écoute de 3,3 X 4,25 mètres, on s’est empressé de brancher le tout et de les positionner sommairement, quelques 48 centimètres des murs arrière et latéraux (à peu près au même endroit que mes Jordan JX-92S habituels) et tournés de 30 degrés vers l’intérieur pour que leurs axes d’écoute se croisent juste devant l’auditeur.

 

Lowther modèle Academy.

Une fois le tout bien installé, on allume les électroniques et on installe le premier disque sur ma platine pour se laisser envahir par une sonorité enveloppante qui nous submerge dans une quasi-infinité de détails. Dès la première écoute on reconnaît la signature sonore remarquable des Lowthers.

Tout est en détail, en subtilité et offre une dynamique à couper le souffle. Comme la très grande majorité des haut-parleurs large bande, la réponse en fréquence est un peu limitée aux deux extrémités du spectre. Le bas est très discret et les hautes sont convenables, mais ne fileront pas aussi haut qu’avec des systèmes 3-voies par exemple.
Par contre, l’ensemble des fréquences reproduites font preuve d’une cohérence et d’une clarté remarquables.

Le ratio élevé entre la puissance du système magnétique et la masse réduite du cône (11,5 grammes pour l’ensemble mobile) permet une très grande rapidité et un contrôle accru de la membrane. Ceci confère aux Lowthers un sens dynamique supérieur aux haut-parleurs traditionnels. Leur transparence, leur impact et le détail reproduit par ces transducteurs procure un réalisme étonnant dans une pièce d’écoute domestique.

Après quelques écoutes, on remarque une légère emphase dans le spectre des moyennes-basses fréquences (ce n’est pas une critique que l’on fait souvent aux Lowthers).
Un certain gonflement qui donne une rondeur agréable à la musique.

On déplace et ajuste les haut-parleurs, tantôt dirigés droit devant, tantôt à angle prononcé.
On décide ensuite de débrancher le deuxième transducteur (celui qui est placé sur le dessus des enceintes). Cette opération a comme effet de diminuer légèrement l’efficacité des enceintes et de réduire substantiellement cette prédominance du bas-médium.
Avec un seul transducteur en opération, on obtient dans ma pièce aux dimensions modestes, un équilibre sonore quand même réussi, malgré une légèreté apparente dans les bas du spectre.

Il faut comprendre que l’ajout du deuxième transducteur dans le modèle Academy ne sert pas vraiment à étendre la plage de fréquences, mais à obtenir une plus forte amplitude dans les basses et le bas-médium afin de compenser pour le manque de renfort lorsque les haut-parleurs sont éloignés des murs arrières et latéraux (on y reviendra plus loin).

Notons tout de suite que l’utilisation des enceintes ACADEMY avec une seule voie n’est certainement pas ce que les concepteurs avaient en tête (le modèle Fidelio et bien d’autres sont conçus dans cette optique), mais nous nous prêterons volontiers à cet exercice afin de bien cerner le caractère propre du transducteur EX-3 en écoute directe.

L’écoute du seul transducteur EX-3 a comme effet d’offrir une découpe plus précise et une meilleure focalisation des instruments dans l’espace. On reconnaît ici les avantages du H-P large bande dans cette habileté à reproduire le message sonore avec toute sa cohérence temporelle et spatiale.

Chaque instrument est plus défini. On note tout de suite l’absence du léger décalage de phase qui est causé par le retard des ondes d’un même signal lorsque le deuxième transducteur est en fonction. L’onde du deuxième transducteur emprunte un chemin plus long alors qu’il doit d’abord réfléchir sur les murs arrières ou latéraux, puis le plafond avant de parvenir à l’auditeur.

Cette combinaison a l’avantage de produire un effet de salle plus convaincant, grâce à l’usage d’un motif réverbérant pour reproduire le signal dans la pièce, mais parfois moins fidèle en terme de netteté des attaques et des textures. Lorsqu’on envoi le signal seulement aux transducteurs avant, on a l’impression d’une plus grande netteté des timbres, d’attaques plus franches et d’écarts dynamiques plus précis.

La dynamique des EX-3, soit dit en passant, permet à ma chaîne de mettre en relief toutes les textures du message sonore et de créer une séparation inouïe entre les différents instruments.
Cette séparation n’est pas uniquement le fruit de quelconque distinction physique entre les instruments, mais le relief harmonique de chaque instrument est tellement bien reproduit qu’il est impossible de confondre les cordes d’un instrument avec celles d’un autre.
C’est cette distinction et cette reproduction des moindres textures et inflexion qui permet aux Lowthers de recréer cette illusion d’espace entre les instruments. Chaque instrument prend sa place, non seulement dans un espace réverbérant, mais aussi par sa façon de produire des textures et des timbres qui lui sont propres.

De même, chaque intonation de la voix est reproduite avec un réalisme qui offre pour moi une nouvelle écoute de pièces et de disques que je croyais jusqu’ici bien connaître (je sais, je sais, on dit toujours ça…).
Il faut mentionner que, quoiqu’étant un audiophile avoué, je suis d’abord et avant tout un mélomane invétéré. J’ai amassé, au cours des années, une sélection très éclectique de musiques (tant sur disques vinyles que sur CD) qui pour la grande majorité ne seraient peut-être pas dignes d’une liste dite audiophile.

Mais ce qui est remarquable à l’écoute des Academy, et qui plaira d’autant plus aux vrais mélomanes, c’est de réaliser à quel point beaucoup de ces vieux enregistrements sont après tout d’excellente facture et, à l’inverse, comment plusieurs repiquage modernes sont ennuyant ou simplement bâclés.

Prenons un vieux vinyle que j’écoute depuis plus longtemps que je n’oserais le dire ici : The Grateful Dead Anthology Vol-1 (Bear’s choice).

Ce disque, produit et réalisé par nul autre qu’Owsley Stanley (eh oui!) offre sa sélection personnelle de pièces en concert, pour la plus grande partie acoustique, alors que ce vénérable groupe était à l’apogée de son talent musical.

Non seulement ce disque offre beaucoup d’espace et de silence entre les instruments, mais il offre aussi des pièces traditionnelles dénudées d’artifices et joués avec simplicité.
À la première écoute de la pièce Katie Mae, joué et chanté par Ron « Pigpen » McKernan (accompagné de Gerry Garcia à la guitare acoustique), ce qui m’a frappé c’est la qualité remarquable des inflexions vocales de Pigpen.

N’étant pas doté d’une très belle voix, c’est la première fois que je remarque à quel point il chante avec nuance et intonation.
Cette révélation est vraie pour l’ensemble du disque. Les Lowthers dans ces cabinets à pavillon mettent en évidence non seulement des détails et des textures, mais aussi les moindres nuances qui sont reproduites avec subtilité, selon la nature de l’enregistrement.
Je m’empresse donc de sortir un autre bijou que j’avais pratiquement relégué aux oubliettes (par un certain manque d’intérêt) : le DC In Memoriam Pau Casals de Lluis Claret (sur étiquette Audivis).

Ce disque qui m’avait d’abord séduit, est devenu à la longue un peu ennuyant. Je sais que cet étiquette produit des enregistrements de qualité, et que le jeu de Claret est pour le moindre remarquable, mais ce qui m’a renversé à l’écoute des Lowthers, c’est la qualité du jeu entre les différents instruments. Pour la première fois, on n’a pas l’impression que l’enregistrement est simplement conçu pour mettre en évidence le violoncelle de Claret, avec quelques accompagnements de Seon-Hee Myong, mais il y a ici un vrai jeu entre les musiciens.

On a l’impression de se tenir à proximité des instruments et d’être témoin d’une camaraderie ou d’une complicité entre la pianiste, Claret et la Barcelona Cellists Ensemble. Les pièces prennent leur envol dans un espace sonore défini et on a non seulement l’impression de s’amuser, mais c’est aussi rempli d’émotions bien senties, juste assez, sans devenir sentimental.

C’est ainsi pour tous les disques de petits ensembles acoustiques que j’écoute, le Pop Pop de Rickie Lee Jones, Relaxin` et Miles Smiles de Miles Davis, Leo Kotke, John Fahey, Lenny Breault, Jesse colin Young, etc… etc… À chaque écoute, toutes les subtilités sonores sont mises en relief pour nous offrir une lecture intime des pièces et du jeu des musiciens.

C’est comme pénétrer dans l’univers musical de chaque enregistrement pour être témoin d’une création, comme si l’on assistait à un concert intime. Ce réalisme ne manque jamais de faire ressortir l’émotion de la musique. Il est un peu perplexe de constater tout ce qui manque à l’appel lorsque l’on écoute des chaînes où cette résolution est absente.

C’est un peu comme contempler une reproduction d’œuvres de Matisse, Chagall ou Rothko (ajoutez les noms qu’il vous plaira), pour finalement contempler la toile originale au Musée Guggenheim (au Louvre, etc.). On a l’impression d’avoir éliminé la mécanique de reproduction et de voir l’œuvre dans sa splendeur pour la première fois.

JE SAVAIS QU’IL SE PASSAIT QUELQUE CHOSE

Une chose que je remarque au fil des écoutes des EX-3, c’est cette quasi-absence des aberrances tonales que l’on associe souvent aux transducteurs Lowthers.
Ces « large bande » ont en effet une remontée significative dans leur courbe de fréquence autour des 2kHz et des 10kHz.
Cette anomalie est aussi souvent exacerbée par les résonances présentes dans la chambre de compression des enceintes à pavillon.
Il faut dire que la chambre de compression des Lowthers, espace situé juste derrière le haut-parleur qui permet d’accorder la coupure de fréquence du pavillon, est habituellement très petite et les parois se trouvent à proximité de la membrane du cône.

 

Lowther modèle Academy.

Étant donné la minceur et la légèreté de la membrane des Lowthers, elles sont très sensibles au retour des ondes arrières qui sont réfléchies sur les parois de la cavité, ce qui peut créer un effet criard lors de passages complexes ou de haute amplitude.
Les enceintes Academy offrent pas moins de 3 solutions pour mitiger les aberrations tonales longuement associées aux transducteurs de la marque.
La première est l’utilisation d’un châssis partiellement fermé derrière la membrane du haut parleur, technologie propre à la série EX de Lowther.

Il s’agit en fait d’une espèce de coupole, qui recouvre toute la partie arrière du transducteur, munie d’évents circulaires accordés de façon à ne laisser que les ondes de basses-fréquences s’échapper pour ensuite être reprises par le pavillon. L’intérieur de cette coupole est tapissé de fibre absorbante qui minimise le retour d’ondes néfastes vers la membrane, ce qui permet de minimiser l’effet de résonance.

Il faut noter que les transducteurs de la série EX sont aussi munis d’une ogive à la forme particulière (un peu comme une poignée de porte) qui sert essentiellement à compenser à l’avant de la membrane la résistance acoustique causée par la coupole arrière. Ceci permet en théorie de faciliter l’équilibre entre la résistance avant et arrière présentée à la membrane, favorisant une excursion symétrique.

 

gros plan sur le cône central d'un HP Lowther

Cette ogive favoriserait aussi une meilleure dispersion des hautes fréquences produites par le deuxième cône concentrique (que l’on nommera whizzer à défaut de terme approprié en français).
Si l’on retire cette ogive (elle est vissée en place), les hautes fréquences deviennent plus directionnelles, mais un peu plus naturelles à mon goût.
Personnellement, je préfère l’écoute sans cette ogive, quoique certains préfèreront les laisser en place.

La deuxième modification apportée à l’ensemble des transducteurs de la marque consiste à former un petit rebord replié sur le deuxième cône concentrique.

Ce « whizzer », de format réduit, est utilisé pour reproduire les hautes fréquences, prenant la relève du cône principal aux alentours de 6kHz et filant en théorie jusqu’à 20kHz. Or les hauts parleurs Lowther on historiquement produit une pointe de résonance aux alentours de 2kHz, résultat de l’interaction entre les deux cônes, plus précisément dans cet espace entre le « whizzer » et le cône principal.

L’introduction de ce rebord, replié de façon à obstruer partiellement cet espace, permet de réduire considérablement cet effet indésirable, offrant ainsi une courbe de fréquence plus homogène que par le passé.
La troisième technologie utilisée par les Academy fait appel à un accord du pavillon appelé Bicor.

Cet accord, aussi conçu par les ingénieurs de Lowther, permet d’éliminer l’effet de résonance causé par le retour de l’onde arrière via le pavillon de l’enceinte.
Le pavillon, qui mesure près de 2 mètres de long, utilise une forme expansive pour amplifier le signal en deçà de 200Hz, relever les basses-fréquences de l’ensemble et étendre la plage reproduite vers le bas du spectre. Mais l’onde ainsi propulsée dans le pavillon vers l’extérieur va aussi effectuer un retour (normal) vers le transducteur et revenir jusqu’à la membrane.

L’accord Bicor (d’accord, d’accord) permet à l’onde arrière, lorsqu’elle est propulsée dans le pavillon par le mouvement de la membrane, de laisser échapper (un peu comme une soupape) l’accumulation d’ondes dans la chambre de compression vers un deuxième évent amorti (en parallèle avec le pavillon). Ce deuxième évent a inversement la tâche de réduire l’amplitude (la pression) du retour de l’onde arrière avant qu’elle ne retrouve son chemin d’origine vers la membrane.

Lorsqu’un pavillon arrière est bien accordé, la pression exercée par la membrane sert avant tout à former une onde qui pourra être reprise par le pavillon et être amplifié par l’expansion de ce dernier (à la façon d’un mégaphone).
La pression doit être suffisante pour permettre la formation de l’onde, et sa projection dans le pavillon. L’utilisation de l’évent Bicor ne semble pas réduire de façon significative l’effet du pavillon, mais fonctionne en complémentarité.

Ça semble un peu compliqué de prime abord, mais le principe semble bien fonctionner et est utilisé dans plusieurs modèles de pavillons arrières de la marque (Bicor 200, Bicor 250, Bicor 2000, Fidelio, Bel Canto).

On perd peut-être légèrement en pression acoustique dans ce registre, mais le compromis semble en valoir la peine.

À l’écoute, tout ça s’entend par l’absence quasi-totale de résonances et de coloration parfois attribuées aux enceintes à pavillon.

On note toute de suite une transparence qui est due, je présume, à l’effort mis en œuvre pour éliminer des ondes stationnaires dans la chambre de compression.
À l’écoute de masses orchestrales, il n’y a aucune trace de congestion ou de confusion dans le message. Peu importe le niveau dynamique du message, ça passe sans trace d’agressivité.

L’écoute de Rachmaninoff par Van Cliburn et le Chicago Symphonic Orchestra (Fritz Reiner), sur étiquette Living-Stereo, révèle une dynamique inouïe sans trace de distorsion aucune.

Les crescendos sont livrés avec une grande clarté et le piano de Cliburn est très distinct et nulle part est-ce que l’on entend de coloration.
Ceci indique que le pavillon est très bien accordé et que le transducteur n’est nullement gêné par la charge acoustique qui lui est présentée.
C’est la même chose avec les Rhapsodies sur un thème de Paganini, op.43 de Rachmaninov livrés par Alain Lefèvre et l‘Orchestre Symphonique de Montréal sous la direction de Matthias Bamert (étiquette Analekta).

On entend bien l’acoustique de la salle derrière le piano et tout reste parfaitement en contrôle eut égard aux écarts dynamiques produits par l’orchestre. La seule chose qui semble manquer à l’écoute de ces deux enregistrements, ce sont les dernières octaves des basses qui donneraient un peu plus de réalisme aux timbales et aux masses orchestrales.
Ceci n’enlève rien au réalisme livré par les Academy, mais lors d’écoutes comparatives, cette absence est quand même notable.

Par contre, à l’intérieur du registre que les Academy sont capables de livrer, l’articulation et le délié des instruments est très surprenant.

La contrebasse a une sonorité chaleureuse, tout en offrant une texture remarquable.

On sent pratiquement la tactilité du bois et de la laque; la texture du crin qui glisse sur les cordes, sans avoir pour autant l’impression d’écouter à la loupe : le corps de l’instrument garde sa réelle dimension.

DEUX VOIES RAPIDES

Pour poursuivre l’écoute, j’ai modifié quelque peu l’acoustique de ma salle pour mieux tirer partie des Academy avec les deux transducteurs en action.
J’ai déplacé les épais rideaux qui couvrent au complet le mur derrière les enceintes.
Ces rideaux, dans une écoute normale, aident à réduire l’effet d’ondes stationnaires et réduisent en partie le déphasage des fréquences moyennes et hautes (le retard causé par les ondes réfléchies).

 

Lowther modèle Academy.

Or pour tirer pleinement partie du design des Academy, il est important, je crois, de bien ajuster l’acoustique de la salle en fonction de l’utilisation de ces haut-parleurs.
L’absence de matière absorbante à l’arrière des enceintes permet de maximiser l’exploitation des ondes qui y sont réfléchies et d’obtenir un meilleur équilibre dans l’ensemble du spectre.

Dans le design des Academy, la position du deuxième haut-parleur sur le dessus de l’enceinte sert entre autre à exploiter les effets réverbérants de la pièce afin de projeter une image large, très convaincante en termes de grandeur et de spatialité.

En effet, l’angle donné au deuxième large bande, d’environ 25 degrés vers l’arrière, fait en sorte que ce dernier utilise, lorsque placé de façon plus ou moins conventionnelle dans la pièce, la réflexion des murs latéraux, arrière et du plafond pour diffuser les moyennes et hautes fréquences dans la pièce.

Il en résulte une écoute beaucoup plus détendue où l’effet de salle est très bien rendu. La largeur et la profondeur de la scène sonore sont absolument remarquables. On retrouve souvent cette signature acoustique avec les haut-parleurs dits bipolaires.
Toute la salle d’écoute est mise à contribution pour nous envelopper dans une sonorité ambiante très plaisante pour certains, mais peut-être distrayante pour d’autres.

 

détail acoustique du plafond

Malgré ses avantages, cette approche n’est pas sans présenter d’autres défis. Par exemple, si l’on compare ce type d’écoute avec une écoute traditionnelle (avec un seul transducteur), on se rend compte que l’on perd un peu de cette précision dans les timbres, des textures et cette habilité à bien camper dans l’espace chacun des instruments.
Bien sûr, la scène sonore paraît plus large et plus convaincante, mais on perd en termes de focalisation et de précision. Ce sont deux écoutes très différentes et chacune présente ses avantages distincts.

En mode 2 voies, les Academy offrent un équilibre tonal beaucoup plus satisfaisant (il faut dire qu’elles n’ont pas été conçues pour une écoute avec un seul haut-parleur, mais la tentation était trop grande). Le bas du spectre retrouve du corps et la prédominance du bas-médium est beaucoup moins évidente maintenant que j’ai ajusté l’acoustique de la pièce.
On retrouve un équilibre qui est très satisfaisant, tout en maintenant le caractère extrêmement dynamique des Lowther et cette habilité à reproduire les moindres nuances avec agilité et précision. Il faut mentionner aussi qu’en mode deux voies, lorsque les haut-parleurs sont branchés en parallèle ou lorsque bi-câblés, l’impédance du système est réduit à 4ohms, et son efficacité est augmenté de 4 à 6 dB (en fonction de la pièce).

Ce système offre donc un rendement qui dépasse les 100dB et qui est capable de reproduire des niveaux sonores presque excessifs sans broncher et sans présenter de distorsion notable.

Cette configuration prend tout son sens à l’écoute de musique d’orchestres plus grands ou d’enregistrements où l’acoustique de la salle est mise en évidence.
À l’écoute de l’Orchestre Symphonique de Montréal par exemple, on sent vraiment l’ampleur de la musique telle qu’elle est reproduite dans la Salle Wilfrid Pelletier de la Place des Arts de Montréal. Les masses orchestrales ont plus d’assise et on sent mieux l’effet réverbérant des lieux.
L’équilibre spectral combiné à la générosité de la présentation procure un effet convainquant et une écoute plus chaleureuse.
Pour les petits ensembles ou les instruments solo, on peut apprécier cet équilibre et cette grande musicalité du système, mais au dépend d’une focalisation légèrement moins précise.

Il faut noter que cette comparaison se fait dans l’absolu, mais qu’en réalité le système Academy demeure un des plus équilibré et des plus réalistes qu’il m’ait été donné d’entendre.

On pourrait comparer la précision des fréquences moyennes à celle des vénérables Quad 57 (électrostatiques), mais avec une dynamique et une extension nettement supérieures. Le caractère propre aux transducteurs Lowther en fait un transducteur idéal pour les mélomanes qui privilégient le réalisme musical (qui se trouve essentiellement dans les fréquences moyennes) plutôt que pour ceux qui concentrent leur écoute sur la capacité d’un système à reproduire les extrémités du spectre.

Aussi, en mode deux voies, les Academy semblent mieux servies par une amplification plus rapide et démontrant un meilleur contrôle dans les basses fréquences.
J’ai obtenu la meilleure écoute avec mon amplificateur gainclone basé sur l’ampli opérationnel LM4086. Cet ampli fournit une puissance de 50 watts par canal sous une charge de 4 ohms.

On pourrait croire, si l’on se fie au folklore habituel, que d’utiliser un amplificateur transistorisé de cette puissance avec des haut-parleurs Lowther frise l’hérésie.

N’en déplaises aux adeptes de la ligne dure, le couple Lowther/Gainclone est tout simplement saisissant. Les transducteurs EX-3 sont parfaitement à l’aise avec ce type d’amplification et le facteur d’amortissement (cette capacité à contrôler le débattement de la bobine mobile) accrue ne fait que mieux exploiter les capacités de ces hauts parleurs (dans leur charge à pavillon).

Chaque visiteur qui a écouté les Academy dans mon salon a commenté sur l’ampleur sonore large et profonde de ce système.

On est ici loin de la sonorité typique de certains haut-parleurs large-bande qui tendent à limiter le champ d’écoute par la directivité inhérente des hautes fréquences de ce type de transducteur.

Cet effet réduit souvent la zone d’écoute à une position centrale entre les deux haut-parleurs. Avec les Academy, on peut percevoir une image sonore large et profonde peu importe notre position d’écoute. J’ai entendu bien des haut-parleurs bipolaires qui n’avaient pas cette habileté à nous envelopper dans un espace sonore aussi généreux et enveloppant.

Pour ma part, je dois avouer que je me suis très vite habitué à cette écoute ample et me suis laissé séduire par le charme indéniable des Academy dans ma salle d’écoute. J’ai rarement entendu un système de haut-parleurs qui combine autant de qualités que les Academy tout en restituant une musique fidèle et saisissant de réalisme. Au cours des dernières années, chaque étape de mon parcours, chaque système utilisé, cherchait à me rapprocher du réalisme offert par ces Lowthers et, dans le cas des Academy, je dois dire que mes attentes ont été nettement dépassées, dans un système aux dimensions très raisonnables.

Conclusion

Il y a plusieurs système que j’ai eu le plaisir d’entendre et qui ont touché cette corde sensible qui nous indique que l’on approche dangereusement du but.
Je pense aux Beauhorn Virtuoso (avec DX-4), les Lammhorn 1.8 (avec les transducteurs AER) ou récemment les Escalante Fremont (il y en a bien d’autres, mais c’est ceux qui me viennent à l’esprit).

Je peux affirmer que dorénavant, en considérant mes préférences marquées pour les « large bande » et la haute efficacité, les Lowther Academy font partie de mon Top 10 personnel.

Qu’elles soient alimentées par un ampli single-ended ou non, tubes ou pas, les Academy offrent à l’audiophile et au mélomane des vertus qui sont remarquables et qui sont rarement combinées avec autant de doigté.

Il ne me reste que quelques jours avant de rendre les Academy à son propriétaire (je ne sais pas si je vais répondre à la porte), alors c’est ici que je tire la ligne pour profiter de ces derniers jours de cette lune de miel.

 

Si vous êtes comme moi amateur de haute efficacité, vous vous doutiez probablement que ces belles blondes ne me laisseraient pas indifférent, mais je peux confirmer que les Academy peuvent facilement s’adresser à un grand nombre de mélomanes, amateur de tubes ou pas.
Elles savent combiner les grandes qualités des Lowther tout en minimisant certaines caractéristiques qui font parfois fuir les auditeurs non-initiés. Les Academy sont à cet égard une réussite de haut niveau.
Malheureusement, il n’est peut-être pas évident d’en trouver une paire en démonstration dans les boutiques HIFI habituelles, mais l’effort en vaut la chandelle.
Il est malheureux qu’il n’y ait pas plus de boutiques qui se risquent à sortir de leur confort, parfois indifférent (et lucratif) pour se lancer sur le sentier de la haute efficacité. Les consommateurs auraient tant à gagner et les mélomanes encore plus.
Pour ceux qui sont suffisamment intéressés par les qualités uniques des systèmes Lowther, il vous reste à explorer les différents sites Internet tenus par leurs irréductibles amateurs et à contacter les distributeurs du produit pour connaître les points de vente ou obtenir une démonstration.

Vous risquez cependant d’y prendre sérieusement goût et, si vous poursuivez plus loin votre quête, de devenir littéralement accroc.
Comme le disent si bien les amateurs de Lowthers, il est parfois difficile de revenir à autre chose une fois qu’on y a gouté… dans ce cas, c’est effectivement Lowther for life.

Protocole d’écoute

Le système

Source analogique :
Table tournante Maplenoll Air-bearing (modifiée) avec bras tangentiel, cellule Denon DL-103R. Step-up à transistor à batteries (2 versions) ou step-up à tubes Grant MC-100. Étage Phono de fabrication maison basé sur les tubes russes 6C45.
Source digitale:
Lecteur Ah-Tjoeb 99 (toutes options incluses) et tubes Amperex.

Préamplificateur

Promitheus TVC signature.
Amplificateurs
Gainclone de fabrication maison basé sur le kit Peter Daniels et l’ampli opérationnel 2086.
Single-ended SE audio (modifié) basé sur les tubes 45 (1,5 watts)
Single-ended Agape. Adaptation du circuit Yamamoto 45, basé sur les tubes 2A3 et A217
Câbles d’interconnexion variés (fabrication maison (cuivre argenté), BIS audio)
Câbles à haut parleurs VDH et Kimber 8-TC.


Distributeur Lowther pour le Canada :

Quinceton Corporation 242, Holmes Ave, Toronto, Ontario, Canada M2N 4N1
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Cet article a été rédigé par Daniel Laurin, rédacteur indépendant, tous droits réservés, copyright 2007, les textes et photos sont la propriété de l’auteur et du magazine.

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